En matière fiscale, chaque délai compte et le temps perdu finit toujours par se payer

Le non-paiement de l’impôt dans les délais légaux entraîne des conséquences immédiates. Les articles du Code général des impôts et du Livre des procédures fiscales fixent précisément les pénalités, les délais et les modalités de recouvrement applicables.

L’article 1730 du Code général des impôts prévoit qu’en cas de non-paiement de l’impôt sur le revenu, de l’impôt sur la fortune immobilière ou des impôts directs locaux à la date limite de paiement, une majoration de 10 % du montant dû s’applique automatiquement. Cette pénalité est considérée, depuis la décision du Conseil constitutionnel du 29 avril 2011 (n°2011-124 QPC), non comme une sanction mais comme une compensation du préjudice subi par l’État du fait du paiement tardif.

Pour les impôts professionnels et indirects comme la TVA, l’impôt sur les sociétés, la contribution économique territoriale ou les droits d’enregistrement, l’article 1731 du même code prévoit un intérêt de retard de 0,20 % par mois et une majoration de 5 % de l’impôt non acquitté. Ces pénalités ne s’appliquent pas lorsque le contribuable régularise spontanément sa situation en déposant sa déclaration accompagnée du paiement. Dans ce cas, seule la majoration de 10 % pour retard de déclaration prévue à l’article 1728 du Code général des impôts est retenue.

Un contribuable peut obtenir un délai de paiement qui suspend toute poursuite. L’article L277 du Livre des procédures fiscales instaure le sursis de paiement, accordé lorsqu’un contribuable conteste une imposition et fournit des garanties suffisantes comme une hypothèque ou une caution. En matière successorale, l’article 1717 du Code général des impôts autorise un paiement différé et fractionné des droits de succession, notamment en cas de transmission d’entreprise. Les héritiers peuvent commencer à régler l’impôt 5 ans après la succession et étaler le paiement sur 10 ans, à raison d’1/20 tous les 6 mois, sous réserve de garanties. Indépendamment de ces dispositifs légaux, il est possible de solliciter du comptable public un plan d’échelonnement des dettes fiscales. Ce plan, purement gracieux, suspend les poursuites tant qu’il est respecté. En cas de non-respect d’une échéance, la dette redevient immédiatement exigible, comme l’a rappelé le Conseil d’État dans une décision du 18 mars 1994 (Ministre c/ Association Gpode Formation, RJF 1994, commentaire 645).

L’administration dispose d’un délai de 4 ans pour engager des poursuites à compter de la mise en recouvrement du rôle, selon l’article L274 du Livre des procédures fiscales. Ce délai est porté à 6 ans lorsque le redevable réside hors de France, sauf s’il réside dans un État membre de l’Union européenne ou dans un pays lié à la France par une convention d’assistance mutuelle au recouvrement. La prescription peut être interrompue par tout acte de poursuite régulier et notifié, tel qu’un commandement de payer, une mise en demeure, une saisie administrative à tiers détenteur ou une déclaration de créance dans le cadre d’une liquidation. Chaque acte ouvre un nouveau délai de 4 ans. La prescription n’est pas d’ordre public et doit être soulevée par le contribuable dans les 2 mois suivant la notification de l’acte litigieux. Le Conseil d’État, dans une décision du 20 mai 2022 (Revue Droit fiscal n°37, commentaire 328), a précisé qu’un contribuable qui règle volontairement une dette prescrite ne peut pas en obtenir le remboursement, même si aucune poursuite n’avait été engagée.

Avant toute exécution forcée, le comptable public doit rappeler au contribuable ses obligations. La procédure de relance progressive, prévue à l’article L257-0 B du Livre des procédures fiscales, distingue les primo-défaillants des récidivistes. Le contribuable primo-défaillant reçoit d’abord une lettre de relance lui laissant 30 jours pour régulariser. À défaut de paiement, une mise en demeure de payer lui est ensuite notifiée par lettre recommandée avec accusé de réception. Cet acte accorde un délai supplémentaire de 8 jours et interrompt la prescription. Depuis le 1er janvier 2018, les comptables publics peuvent recourir directement à une relance simplifiée sans lettre préalable lorsque l’impayé dépasse 15 000 euros, lorsqu’il s’agit d’un contribuable déjà défaillant dans les 3 années précédentes ou lorsque la créance résulte d’un avis de mise en recouvrement.

10 % de majoration pour les impôts recouvrés par voie de rôle, 0,20 % d’intérêt de retard et 5 % de pénalité pour les impôts professionnels, un sursis de paiement possible sous conditions, une prescription de 4 ans portée à 6 ans pour les non-résidents et une procédure de relance en deux étapes, 30 jours puis 8 jours. Ces dispositifs traduisent un équilibre entre efficacité du recouvrement et protection du contribuable.

Karim Trabelsi

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