La communauté universelle : un régime de fusion patrimoniale
La communauté universelle est un régime matrimonial prévu à l’article 1526 du Code civil qui dispose que « les époux peuvent établir par leur contrat de mariage une communauté universelle de leurs biens tant meubles qu’immeubles, présents et à venir. Toutefois, sauf stipulation contraire, les biens que l’article 1404 déclare propres par leur nature ne tombent point dans cette communauté. La communauté universelle supporte définitivement toutes les dettes des époux, présentes et futures ». Ce régime ne s’applique pas automatiquement : il doit être expressément choisi par les époux dans un contrat de mariage établi devant notaire.
Le principe fondateur de ce régime est la mise en commun de tous les biens, qu’ils soient meubles ou immeubles, présents ou futurs. Cela inclut les biens acquis avant le mariage, mais également ceux reçus par héritage ou par donation, sauf si une clause spécifique prévoit leur exclusion. Ainsi, le patrimoine des époux est totalement fusionné et forme une masse unique, distincte des patrimoines propres qui existent dans les autres régimes.
La gestion des biens dans ce cadre obéit aux mêmes règles que celles prévues pour la communauté légale réduite aux acquêts, mais la différence majeure réside dans l’étendue de la masse commune, qui englobe la totalité des actifs. Chaque époux dispose donc d’un pouvoir de gestion sur un patrimoine commun absolu.
La communauté universelle s’étend également aux dettes : toutes les dettes, présentes et futures, deviennent communes, sauf stipulation contraire. Ce mécanisme entraîne un partage intégral des risques financiers, chaque époux étant solidairement engagé, quelle que soit l’origine ou la nature de la dette contractée.
Lors de la liquidation du régime, les biens sont partagés à parts égales, sans distinction entre biens propres et biens communs, puisqu’il n’existe qu’une masse commune. Ce partage simplifié reflète la philosophie de ce régime : l’union patrimoniale totale.
Les avantages de la communauté universelle sont manifestes, notamment pour la protection du conjoint survivant. Grâce à des clauses particulières, comme la clause d’attribution intégrale, il est possible de transmettre automatiquement l’ensemble du patrimoine commun au conjoint survivant, souvent sans fiscalité supplémentaire. Ce régime s’avère particulièrement adapté aux couples fusionnels ou aux unions sans enfants issus d’autres mariages, où la priorité est donnée à la protection réciproque des époux.
Cependant, ce régime présente aussi des inconvénients. La confusion totale des patrimoines peut s’avérer risquée, notamment en cas de dettes importantes contractées par l’un des conjoints, car le patrimoine entier se retrouve exposé. Par ailleurs, lorsque la clause d’attribution intégrale est insérée, elle empêche l’application cumulative des abattements fiscaux en ligne directe lors de la transmission aux enfants, ce qui peut réduire l’efficacité fiscale du dispositif.
La communauté universelle incarne donc le régime matrimonial de la fusion patrimoniale totale. Elle assure une protection optimale du conjoint survivant, mais au prix d’une exposition accrue aux risques financiers et d’une perte de flexibilité fiscale. Ce choix exige une réflexion approfondie, en tenant compte à la fois de la structure familiale et des objectifs patrimoniaux des époux.
Karim Trabelsi