La donation résiduelle : transmettre ce qui subsiste

La donation résiduelle constitue une forme subtile de libéralité avec charges. Elle permet à une personne de gratifier deux bénéficiaires successifs, en organisant dès l’origine la transmission d’un patrimoine qui pourra, au fil du temps, se trouver entamé. L’article 1057 du Code civil en fixe le cadre : il peut être prévu qu’un premier gratifié recueille un bien, avec l’obligation de transmettre, à son décès, ce qu’il en restera à un second gratifié désigné dans l’acte.

À la différence de la donation graduelle, la donation résiduelle ne contraint pas le premier gratifié – appelé le grevé – à conserver les biens reçus. Il peut en disposer librement, les consommer, les aliéner, sous réserve des limites posées par la loi. L’article 1059 du Code civil précise ainsi qu’il ne peut en disposer par testament, et que l’acte peut, le cas échéant, interdire toute donation entre vifs. Mais il reste libre d’en user au quotidien. L’obligation qui pèse sur lui est plus légère : il n’a pas à préserver l’intégralité du bien, seulement à transmettre ce qui subsistera à son décès.

Le second gratifié, dit l’appelé, tient directement ses droits du disposant, et non du premier bénéficiaire. Cette subtilité juridique marque la volonté du donateur d’assurer une continuité patrimoniale, tout en offrant une grande liberté de jouissance au premier gratifié.

La donation résiduelle s’inscrit donc dans une logique d’équilibre : d’un côté, le disposant protège le premier bénéficiaire en lui permettant d’user largement du bien transmis ; de l’autre, il veille à ce qu’une partie, même réduite, puisse revenir à un second bénéficiaire. Elle traduit souvent une volonté de concilier la sécurité matérielle d’un proche – conjoint, enfant ou partenaire – avec la transmission anticipée d’un héritage en faveur d’une autre génération.

Instrument juridique souple, la donation résiduelle illustre la capacité du droit des libéralités à s’adapter aux situations familiales complexes, en ménageant à la fois liberté et continuité.

Karim Trabelsi

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